L’écharpe relationnelle et la responsabilité dans la relation

la relation et la responsabilité de chacun

Jacques Salomé, célèbre psychosociologue et écrivain, a inventé le concept de « l’écharpe relationnelle » : « Lorsque nous acceptons de prendre la responsabilité, à notre extrémité, de ce que nous éprouvons, ressentons ou pensons, quoi que fasse l’autre, nous accédons à une meilleure prise en charge de la relation. » (La ferveur de vivre, 2012).

L'écharpe relationnelle, qu'est-ce que c'est

[Chacun est responsable de son bout]

C’est donc par une écharpe que Jacques Salomé symbolise la relation (quelle qu’elle soit, même si l’image se prête particulièrement bien aux relations familiales et relations de couple), écharpe que chacun des protagonistes tient par un bout : d’après Jacques Salomé, chacun est responsable de son bout de l’écharpe, c’est-à-dire de son côté de la relation. Ainsi, dans ma relation de couple par exemple, je suis responsable de mon côté, c’est à dire de ce que je ressens, je pense, je dis, je fais ; et l’autre, mon mari, est responsable de ce qu’il ressent, pense, dit, fait. En conséquence, je ne suis pas responsable de ce qu’il ressent, pense, dit, fait ; et il n’est pas responsable de ce que je ressens, pense, dis, fais.

[Donc je ne ne suis pas responsable du bout des autres]

Il n’est donc pas responsable de la peine que je peux ressentir si il me dit quelque chose qui me fait de la peine, pas plus que je ne suis responsable de la colère qu’il peut ressentir suite à des propos que je tiens (l’inverse fonctionne aussi) ; un ado ne sera pas non plus responsable de la colère de son père, de la peine de sa mère (et vice-versa) – les exemples sont infinis.

[Mais je suis entièrement responsable de mon bout]

En revanche, je suis entièrement responsable de la colère qui m’envahit, puisqu’elle se passe en moi et qu’un autre n’aurait sans doute pas la même réaction ; et je suis également responsable de ce que j’en fais : ce que je ressens, ce que j’exprime, relève bien de ma responsabilité émotionnelle. Et n’est-ce pas merveilleux ? S’en rendre compte nous permet de récupérer le pouvoir sur notre vie – tout en nous permettant aussi de mieux nous connaître : cette colère, que dit-elle de moi ? La personne que je suis lorsque je suis en colère correspond-elle à qui je veux être (oui si cette colère me permet d’agir lorsque je trouve que mes congénères perdent leur humanité dans des actions ignobles ; non si cette colère déborde et fait que je deviens incompréhensible quand je m’exprime ; non si elle concerne mes enfants et que je voudrais réagir avec calme et sérénité).

Chacun retrouve alors sa place

["Tu m'énerves !"]

Mais donc que devient le « tu m’énerves ! » ? Qui est responsable et de quoi ? Puisque je suis responsable de mes émotions, l’autre peut-il m’énerver ? Non, contrairement à ce que notre façon de parler pourrait laisser dire, il n’a pas ce pouvoir. Ce « tu m’énerves ! » pourrait judicieusement être remplacé par un « lorsque tu fais cela, cela me met mal à l’aise », ou « cela heurte quelque chose d’important en moi », ou « j’ai de la peine quand je t’entends dire cela », ce « tu m’énerves ! » devrait devenir une expression qui met en exergue l’idée que l’émotion que je ressens n’est qu’une réaction à un stimulus, et qu’elle se passe chez moi, en moi.

[Donc je n'ai pas à me sentir responsable de la colère de l'autre]

Et donc… exit, la culpabilité ! Doit-on se sentir coupable que notre conjoint/conjointe soit en colère suite à notre refus d’aller manger chez ses parents ce dimanche ? Non, nous avons exprimé (avec assertivité, voir ci-dessous) notre point de vue, notre envie, notre besoin, et sa colère est la réaction à nos propos, qui font office ici de stimulus : il/elle en prend la responsabilité et la garde (et il/elle pourra s’interroger sur ce que cette colère veut dire – besoin de contrôle, peur du rejet, etc… à lui/elle de faire son introspection).

Bien sûr, cela est d’autant plus valable que l’on s’exprime avec assertivité : en parlant en son nom (c’est à dire en parlant de soi, et non pas de l’autre), avec respect, et avec une vraie écoute (de moi et de l’autre).

La confusion entre responsabilité et culpabilité est à l’origine d’un grand nombre de malaises relationnels, qui peuvent parfois mener à la rupture… alors que seule, la relation est en cause – et non pas l’autre ni l’amour que nous lui portons. Être responsable, c’est assumer tout ce qui nous appartient, c’est à dire nos sentiments, nos pensées, nos paroles, nos actes et leurs conséquences… et laisser les leurs aux autres.

[Mettre son énergie là où elle sera utile]

Quel soulagement lorsque l’on comprend ça : et parce que l’on (re)devient maître/maîtresse de sa vie, et parce que l’on se rend compte que l’on n’a aucun pouvoir sur l’autre ni sur ce qu’il ressent – et on peut donc arrêter de dépenser de l’énergie à tenter de changer ce qui ne dépend pas de nous.

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